Les personnes adoptées doivent souvent expliquer leur réalité aux personnes de leur entourage. Elles ne trouvent pas les mots justes, ne savent pas par où commencer ou comment exprimer l’amalgame de sentiments paradoxaux et confus qui les habitent. Elles doivent gérer les impacts de leur adoption sur leur bien-être.
Même s’il n’existe pas de preuve que l’adoption est un traumatisme (Brodzinsky, Gunnar et Palacios, 2022), il est possible d’établir des connexions entre les conséquences d’un trauma complexe et les impacts de l’adoption. Ainsi, cet article a pour objectif de définir le trauma complexe et ses neuf (9) conséquences sur le fonctionnement d’une personne.
Comment définir un trauma complexe ?
D’abord, un trauma est associé à un événement de vie adverse qui provoque une réaction physique et psychologique extrême (American Psychological Association, 2012). Il est déclaré complexe lorsqu’il est relationnel, c’est-à-dire qu’il est causé par une relation interpersonnelle qui implique entre autres une trahison entre une personne responsable des soins, de la protection ou de l’encadrement de sa victime (Ford et Courtois, 2013). L’expérience est répétée ou prolongée et survient à des périodes vulnérables du développement de la vie, comme la petite enfance, ou qui ébranlent significativement les acquis développementaux à n’importe quel moment de la vie (Ford et Courtois, 2013).
En comparaison, l’adoption implique forcément une séparation entre la mère biologique et la personne adoptée. Plusieurs circonstances peuvent affecter la séparation dont la raison est parfois méconnue. Similairement au trauma complexe, l’abandon (perçu ou réel) par une figure parentale qui était responsable des soins et de la protection de la personne adoptée affecte son développement.
Quelles sont les conséquences du trauma complexe sur une personne ?
Le trauma complexe a une incidence sur les sphères de fonctionnement de l’individu, qui sera plus susceptible de développer 1) des difficultés relationnelles et d’attachement, 2) une identité et une conception de soi altérées, 3) de somatisation et des problèmes de santé, 4) des problèmes cognitifs et d’apprentissage, 5) de la régulation des émotions, 6) de la compréhension du monde, 7) des comportements dysfonctionnels, 8) de la dissociation et 9) des difficultés au niveau de la mentalisation (Milot et al., 2018). Les répercussions peuvent s’enchevêtrer.
En adoption, toutes les sphères du fonctionnement de l’individu énumérées dans le trauma complexe sont également applicables. L’adoption occasionne entre autres des enjeux d’attachement, d’identité et d’adaptation (Daigle, 2020). Par exemple, une personne adoptée vit souvent des enjeux relationnels similaires à ceux vécus par une personne ayant vécu un trauma complexe. Elle adopte fréquemment l’une des deux attitudes diamétralement opposées: 1) elle est méfiante, détachée et garde ses distances avec les autres ou 2) elle vit de grandes difficultés à se retrouver seule, elle recherche systématiquement la présence constante de l’autre.
Conclusion
Au premier regard, les conséquences du trauma complexe et les impacts de l’adoption sont similaires, mais il existe des distinctions et des subtilités qui seront explorées dans les prochains articles. Le mois prochain, les problèmes relationnels et d’attachement seront comparés et analysés sous l’angle de la théorie de l’attachement. Comment est-ce que le modèle d’attachement adopté par un enfant est affecté par un trauma complexe ? Comment est-ce qu’il diffère ou suit la même trajectoire en contexte d’adoption précoce ? Que se passe-t-il à l’âge adulte ? Ces questions serviront de pistes de réflexion pour explorer les enjeux de l’adoption.
Références